Gel supplémentaire de 1 milliard d’euros des dotations aux collectivités locales, taxation très symbolique et même leurre (et temporaire !) des hauts revenus, modification de l’impôt sur les plus-values immobilières, augmentation des prix du tabac, de l’alcool et des boissons avec sucre rajouté, coup de rabot supplémentaire sur les niches fiscales… François Fillon a dévoilé aujourd’hui les différentes mesures du plan d’austérité pour les deux années à venir. Objectif : réaliser 1 milliard d’euros d’économie dès cette année et 11 milliards en 2012.
La taxation des «ultra-riches» sera donc de 3% à partir de 500 000 euros de revenu annuel. Pour ces privilégiés qui gagnent ainsi au moins 40 000 euros par mois, l’impôt supplémentaire se montera à… 1 500 € sur l’année. Mais la plus lucrative des mesures annoncée sera la modification des règles de taxation des plus values immobilières (hors résidence principale) et cela touchera plus de monde: près de 2,2 milliards de revenus supplémentaires attendus en 2012.
Rapide calcul de La Tribune pour un propriétaire détenant un bien (hors résidence principale) depuis 15 ans, qu’il a acheté l’équivalent de 100 000 euros et qui vaut aujourd’hui 200 000 euros. S’il a signé son compromis (ou promesse) de vente le 23 août ou même ce mercredi, il ne paiera aucun impôt sur la plus-value. S’il signe le compromis à partir de demain (jeudi 25 août), il devra s’acquitter de 24 245 euros d’impôts.
M. Fillon a annoncé un « relèvement, de 12,3 % à 13,5 %, des prélèvements sociaux des revenus du capital, toujours dans un souci de rapprochement de la taxation des revenus du travail et de ceux du capital », a-t-il dit. Ce relèvement reste néanmoins très éloigné du niveau de taxation des revenus du travail (en moyenne 42 %)
Les premières mesures anti-déficit, applicables dès cette année, seront adoptées par le Parlement lors de la session extraordinaire convoquée le 6 septembre pour examiner le nouveau plan européen d’aide à la Grèce.
François Fillon a révisé à la baisse les prévisions de la croissance en 2011 (1,75% contre 2%) et 2012 (1,75% contre 2,2%), montrant ainsi que rien n’est prévu pour soutenir la croissance et l’emploi…
Pour Marie-George Buffet (PCF), «les remèdes proposés par Nicolas Sarkozy et son Premier ministre ne risquent pas de guérir la France des maux dont elle souffre, au contraire. Ce qui creuse la tombe de l’économie française, c’est le diktat des marchés financiers! Or, les solutions préconisées ne peuvent que les réjouir».
Pour Jean-Luc Mélanchon, le candidat du Front de gauche à la présidentielle, «la politique d’austérité qui vient d’être décrétée, étranglant le budget de l’Etat et des collectivités territoriales» est «un contre-sens dramatique». Selon lui, cette cure d’austérité «creusera les inégalités sociales». Ainsi, déplore-t-il, «sur onze milliards de coupes claires définitives, les riches ne donneront que moins de 10% et encore à titre provisoire. Les riches ne paient que pour un temps et les autres pour toujours. Rien sur les banques rien, sur les superprofits des très grands groupes»Eva Joly, candidate d’Europe Ecologie-Les Verts (EELV) à la présidentielle, déplore les mesures «cosmétiques» annoncées par François Fillon face à la crise, le jugeant «prisonnier du court terme et de ses arrières pensées électorales».
Benoît Hamon, porte-parole du Parti socialiste, regrette le «cynisme» de ces mesures, estimant que la France a «officiellement plongé dans l’austérité». «Le seuil de tolérance des Français aux orientations et au cynisme du gouvernement va être franchi à la lecture des mesures proposées», précise-t-il. « Le vrai bilan de ce gouvernement, c’est 0 % de croissance et 4 millions de chômeurs. Et parmi les mesures qu’il propose, la taxe sur les hauts revenus est emblématique de son cynisme puisqu’elle ne rapportera à l’Etat que 200 millions d’euros en 2012, quand le chèque fait aux plus riches » avec la réforme de l’impôt sur la fortune « est de 1,8 milliards d’euros », a-t-il poursuivi.
François Bayrou dénonce également un plan de «rustines». «Au lieu d’avoir un grand plan cohérent et ambitieux, compréhensible par tous les Français», la présentation des mesures «était faite pour que le citoyen n’y comprenne rien, même le citoyen le plus averti» juge le président du Modem.
Pour Michel Sapin, député PS et ancien ministre de l’Economie, «François Fillon fait le constat d’échec de sa politique budgétaire et reconnaît deux graves erreurs : la politique fiscale et la politique en faveur des heures supplémentaires puisqu’il se sent obligé d’écorner cette politique.(…) La plupart des mesures seront payées par M. et Mme Tout le monde. L’augmentation des taxes est tout de suite et payé par tout le monde.»
Le numéro deux de la CFDT Marcel Grignard a estimé que le plan du gouvernement était «déséquilibré» et «pas à la hauteur des enjeux», risquant notamment de provoquer «une aggravation du chômage».