C’est un véritable réquisitoire contre la politique économique deFrançois Hollande engagée depuis janvier. Mais la nouveauté, c’est qu’il vient cette fois du propre camp du chef de l’Etat. Quelques heures avant le séminaire organisé par le PS sur «la réussite du pacte de responsabilité», plusieurs responsables socialistes ont interpellé leur parti dans un document appelant à une remise en cause du tournant social-démocrate initié par le président de la République début janvier.
Ce texte, intitulé « Il n’y a pas qu’une seule politique possible» et que Le Monde s’est procuré aujourd’hui, est signé par les membres du courant d’Emmanuel Maurel et Marie-Noëlle Lienemann «Maintenant la gauche», autrement dit l’aile gauche du PS, à laquelle s’ajoutent les amis du ministre de la consommation Benoît Hamon, réunis dans le courant «Un monde d’avance», ainsi que quelques représentants de la «motion 4» au dernier congrès socialiste de Toulouse en 2012, constitué à l’époque par Stéphane Hessel. Soit au total environ un tiers des élus aux instances nationales du PS.
Dans sa tribune, cette coalition alternative fustige la politique solitaire de F. Hollande, estimant que «tout ne peut pas procéder d’un seul homme», et appelle la majorité à «une réaction». «L’orientation en matière de politique économique suscite des désaccords et des inquiétudes dans nos rangs», écrivent ces socialistes qui considèrent que la gauche doit continuer à «faire vivre la promesse» du discours du Bourget de janvier 2012, moment phare de la campagne présidentielle de F. Hollande dans lequel il avait désigné la finance comme son «adversaire».
Principale cause de leur mécontentement : le contenu du «pacte de responsabilité». «Nous ne nous reconnaissons pas dans le discours qui tend à faire de la baisse des charges et du coût du travail la condition d’un retour de la croissance», expliquent les signataires qui avaient déjà eu du mal à accepter le CICE mis en place à l’automne 2012.
« Les propositions contenues dans le pacte de responsabilité sont déséquilibrées », jugent-ils. A commencer par les contreparties qui «restent floues». Ces socialistes critiques estiment même qu’ «il faudra plus qu’un “observatoire” pour imposer amélioration des conditions de travail, discussion sur les salaires, partage du travail ou multiplication des embauches », soit leurs conditions au compromis social passé par l’exécutif avec le Medef.
Autre champ de leur «inquiétude» : les économies de 50 milliards d’euros des dépenses publiques sur trois ans pour financer la politique familiale. Une telle politique présente selon eux des «risques majeurs», dont celui de «rogner sur le modèle social français ».
«On entre dans une période nouvelle, explique au Monde le député Pouria Amirshahi, signataire du texte. François Hollande a mis fin à la synthèse avec son tournant social-libéral imposé sans discussion. Nous décidons donc de nous regrouper au-delà des chapelles et des courants du PS pour tracer une alternative à la politique et à la stratégie de l’exécutif.» Outre un PS «autonome» et «relais des aspirations mais aussi des mécontentements», ce bloc contestataire appelle également à un «rassemblement de la gauche», avec le PCF et le Parti de Gauche, qualifié d’«ardente obligation».